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Institut d'Études sur le Droit et la Justice dans les sociétés Arabes

Les problématiques de l’accès à la justice

La Justice entre offre et demande

Les systèmes judiciaires proposent-ils des réponses efficaces aux demandes des citoyens ?

Un juge ne peut dénier rendre justice et, en principe, tous les citoyens ont la possibilité de se présenter devant un tribunal avec une attente légitime de faire valoir leurs droits et d’obtenir un jugement. Théoriquement, ces éléments font du pouvoir juridictionnel (ou judiciaire) l’institution la plus accessible vis-à-vis des autres branches politiques (législatif et exécutif). Cependant, il existe certaines limites pour y accéder. Ces limites pourraient avoir été mises en place pour réduire la masse des litiges et prévenir un engorgement des juridictions. Plusieurs types de « barrières » existent et bien que leurs formes ou buts diffèrent, elles jouent un rôle prépondérant sur l’accès à la justice.

La première barrière est le coût de l’accès à la justice. C’est une problématique globale qui implique que la pauvreté empêche l’accès à l’information ou une représentation adéquate.

Le droit devrait-il être impliqué dans cette dimension économique et sociale à travers des instruments tels que l’aide juridictionnelle ou devons nous considérer la pauvreté comme une problématiques hors du champ d’action du droit ?

La deuxième barrière est procédurale. Il existe en effet une disparité entre les justiciables qui dépend des conditions requises pour que soit reconnu un intérêt à agir qui permettent une représentation légale uniquement aux personnes qui puissent justifier d’un intérêt personnel et direct dans un litige.

Quelles comparaisons pouvons-nous établir et comment définir les barrières procédurales ? Sont-elles des entraves ou témoignent-elles d’une forme d’efficacité dans le but qu’elles recherchent ?

Les modes alternatifs d’accès à la justice ainsi que les mécanismes non-judiciaires de résolutions des litiges sont des offres de justice à considérer. Les modes traditionnels de règlement des différends sont profondément ancrés dans les pratiques sociales de plusieurs communautés du Moyen-Orient. Le recours à cette justice informelle est d’actualité et il semblerait qu’il soit même un moyen d’accès à la justice primordial pour les citoyens qui s’éloigneraient ainsi des institutions judiciaires officielles. Le recours aux juridictions informelles serait favorisé de par leur efficacité, leur capacité à établir des décisions dans des délais réduits et du fait qu’elles sont peu onéreuses. Leur fonctionnement est parfois même pensé en adéquation avec le système judiciaire des Etats.

Ce mode de justice informel, basé sur le droit coutumier et les lois tribales est-il plus efficace que le système officiel ? Devrions-nous favoriser les recours à ces instances traditionnelles ou devraient-elles être supprimées ?

Les attentes de la justice

Les représentations, valeurs partagées et croyances, établissent un lien entre le droit et les citoyens1. Les attentes des sociétés vis-à-vis du service public de la justice semblent être en plein essor au vu du contexte politique. Pour répondre à ces attentes il ne s’agit pas de considérer uniquement les règles et les procédures mais bien les cultures juridiques et judiciaires dans leur ensemble. Cette démarche introduit une difficulté due à la pluralité de ces cultures juridiques marquées par la religion, la société, l’histoire et le politique. Ces éléments, omniprésents dans les sociétés arabes, nous donneront des pistes de réflexion sur ce que signifient le droit et les modalités de l’accès à la justice.

Existe-t-il un manque de transparence lié à la culture juridique des pays du Moyen-Orient ?

Les citoyens sont-ils suffisamment informés de leur droit à l’aide juridictionnelle et de leur droit à obtenir réparation pour un préjudice ?

La pluralité des cultures juridiques induit également des attentes différentiées. La question qui demeure est la suivante : quels sont les éléments qui influencent notre conception de la justice et les modalités de l’accès à la justice ? Ce type de questionnement interroge les conditions préalables à la construction ainsi qu’aux représentations liées à la justice.

Les individus et la société au sens larges considèrent-ils les institutions judiciaires comme étant en capacité de leur fournir une justice conforme à leurs attentes ?

Les “Gate-Keepers de la justice”

Les intermédiaires entre la justice et les citoyens.

Le parcours des justiciables passe nécessairement par une médiation, des personnes qui orientent et contrôlent son déroulement. Ainsi, les avocats, procureurs, juges et huissiers, entre autres, contrôlent l’accès à la justice. Leurs représentions et les valeurs de ces « gate-keepers », autrement dit leurs seules volontés peuvent permettre aux justiciables de faire valoir leurs droits et orientent la façon dont est rendue justice.

Les avocats sont les acteurs de la médiation entre les citoyens et les juridictions. De par leurs actions, ils déterminent la quantité d’affaires portées devant ces juridictions. La volonté des avocats de porter ces affaires est ainsi d’une importance capitale notamment pour l’aide légale aux personnes qui ne disposent pas de ressources suffisantes ou qui sont socialement désavantagés, notamment dans les cas à coloration politique.

Les avocats devraient-ils encourager le recours à la médiation en tant que premier mode d’action en justice ?

Quels sont les avantages et les inconvénients des plaidoyers politiques ? Devraient-ils être encouragés ?

Quelles seraient les instances les plus pertinentes pour la conduite d’actions collectives ?

L’implication des pouvoirs juridictionnels dans les procédures judiciaires est important. Le véritable accès à la justice ne se réduit pas à la simple entrée dans la procédure mais continue bien au-delà. Le juge et le procureur ont ici une place essentielle. Ils détiennent le pouvoir d’influencer la procédure et ses résultats. Cependant, les parties peuvent, elles aussi, contrôler et orienter les résultats de ces procédures.

Quels sont les acteurs, juges et procureurs mis à part, susceptibles d’avoir une influence dans la salle d’audience ?

Les personnes capables d’influencer le cours de la justice usent-ils de mécanismes disponibles au cours des procédures ou mettent-ils en place des stratégies à dimension psychologique ?

D’un autre côté, quand nous parlons de l’accès au droit et à la justice, nous ne pouvons omettre de parler des règles du procès équitable (due process), en effet, l’accès au droit est une condition non révocable afin d’obtenir un procès équitable.

Les définitions récentes du procès équitable sont visiblement progressistes dans le sens où, tout le processus devant la justice semble s’y intégrer.

L’avant procès : l’accès au droit, à l’information : qu’elle rôle joue l’avocat ? Les greffes des tribunaux ? Les huissiers de justice dans leur devoir de notification ?

Durant le procès : les règles de procédures, les acteurs du procès et leur devoir et obligation afin de rendre un procès équitable. Quel devoir et quelle règle éthique ont les juges et procureurs ? Les parties, quels droits et quelles obligations ? les avocats, quel rôle et quelle déontologie ?

L’après procès : le rôle de la justice s’arrête-t-il à la décision du tribunal ? Suite à la jurisprudence européenne Hornsby2, le délai raisonnable de l’exécution de la décision de justice est clairement mentionné comme étant une condition du procès équitable. Qui est donc l’acteur principal de cette phase d’après procès ?

Et qu’en est-il de la situation du procès équitable dans les pays arabes ?

Le terme procès équitable est mentionné dans la quasi-totalité des constitutions et des règles de procédure des pays arabes, et particulièrement les phrases suivantes : « toute personne a droit à un procès équitable » ou « toute personne est présumée innocente jusqu’à preuve du contraire dans un procès équitable »

Ces tournures de phrase nous laissent dans l’interrogation de ce qu’est le « procès équitable » cité dans ces textes  et si dans les pays arabes nous limitons le procès équitable à la présomption d’innocence 

Les interrogations mentionnées ci-dessus seront donc l’objet principal de notre débat sur cette composante de la plateforme.

 

1 Émile DURKHEIM, De la division du travail social, Paris, 1893
2 Olivier DUGRIP, Frédéric SUDRE, « Droit à un procès équitable et exécution des décisions de justice », La Semaine Juridique Edition Générale – 19 Novembre 1997 – n° 47, [En ligne], http://www.lexisnexis.fr/droit-document/article/la-semaine-juridique-edition-generale/47-1997/J05_PS_SJG_SJG9747JJ05.htm#.WdDg9NGZTIU

 


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